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Le Diaconat réformé de Paris avant 1882
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Charles Voigt est agent général de l’Union consistoriale et de la délégation générale des diaconats.
Monsieur le Président,
Mesdames, Mesdemoiselles et Messieurs,
Le Christ étant venu déclarer au Monde que « tout ce qu’on faisait pour les pauvres, on le faisait pour lui », le « soin des pauvres », qui ne s’était précédemment montré que sous la forme rudimentaire d’actes individuels d’assistance, devint une préoccupation qui devait donner naissance au Diaconat de la Primitive Église.
À la question : Quid pauper? (Qu’est-ce qu’un pauvre ?), que le paganisme n’avait pas résolue, l’Évangile répondait : Un représentant du Christ (Deus in pauperibus)1.
Toutefois, le Diaconat ne devait pas subsister à cette époque de l’Histoire au-delà du VIe siècle.
L’idée chrétienne de la Charité fut peu à peu remplacée au Moyen-Âge, par celle du Mérite, et celle du Travail par celle de la Mendicité. L’aumône se développa de plus en plus… et le dernier mot du système d’assistance de cette époque se montre dans le « Moine Mendiant »… Il y eut bien alors des actes individuels ou « conventuels » de charité. Il n’y eût plus, à proprement parler, de « soin des pauvres ». Pour que la place du soin des pauvres put être reconquise, il fallait changer à la fois — comme l’a si justement écrit M. le Doyen Émile Doumergue — le principe, le but et le moyen de la charité de l’époque :
Luther commença cette profonde réforme. Calvin l’acheva.
« L’office des diacres, déclare-t-il, c’est d’avoir la sollicitude des pauvres ». Dans ses Ordonnances Ecclésiastiques (1541), il publia que « les diacres constituent la quatrième charge de l’Église, « diacres procureurs », pour recevoir, dispenser et conserver les biens des pauvres, « diacres hospitaliers, pour soigner et panser les malades ».
Quelques années plus tard, en 1557, le Diaconat réformé apparaît officiellement en France au Synode régional de Poitiers. Et deux ans après, en 1559, la Discipline des Églises Réformées de France porte que les Anciens et les Diacres sont le Sénat de l’Église, que leur office est de « recueillir et de distribuer, par l’avis des Consistoires, les deniers des pauvres, des prisonniers et des malades, les visiter et en avoir soin. »
Cependant que les Édits3 hostiles à la « Religion Prétendue Réformée » vont se multipliant, le fonctionnement du Diaconat s’établit à Paris, ainsi qu’en fait foi le Règlement de
POLICE ET ORDRE GARDEZ
en la distribution
des deniers Aumosnes aux pauvres de l’Église réformée
en la Ville de Paris.
Accordez au Consistoire estably en ladite Ville
par les Ministres, Diacres et Députez de l’Église :
Publiez et annoncez en pleines Assemblées des fidelles,
le dixième jour de Décembre MDLXI, au lieu de Popincour,
et l’onzième consécutif, au lieu nommé le Patriarche, faubourg Saint-Marcel.4
Aux termes de ce Règlement considéré comme le premier Acte où la pensée de la Réforme française se soit formulée, en ce qui concerne la distribution des secours aux pauvres par le Diaconat, un « Bureau » est dressé, pour lequel seront élus « 8 notables bourgeois et habitans de la Ville de Paris. 4 Membres du Consistoire, et avec eux seront encore les diacres de l’Église, en tel nombre que l’opportunité requerra… » « Les Membres du Bureau seront nommez et présentez au peuple au commencement du Presche; ils recueilleront les deniers dans des boëttes, les inscriront sur un registre… », « les deniers seront distribuez aux pauvres de l’Église, à chacun particulièrement selon la nécessité »…, la distribution sera faite « telle qu’il sera advisé estre raisonnable…, la charge des diacres sera de faire revue toutes les semaines de tous les pauvres du quartier qui leur seront commis. »
Il y a alors à Paris 12 Anciens et 12 Diacres, nombre que Calvin avait fait adopter au Petit Conseil de Genève en 1541, en souvenir du nombre des Apôtres.
Des « préoccupations sociales » ne sont pas longues à se montrer dans le Diaconat. Nous en trouvons la trace dans une Note de Viret, envoyée par le Synode Régional du Languedoc au Synode National de 1562, qui, reproduisant plus ou moins les ordonnances de Calvin, indique encore que l’oisiveté est interdite sous peine d’être privé d’assistance, que les enfants sont mis en apprentissage ; les filles « colloquées en service aux maisons des fidèles », pour apprendre « la conduite d’un ménage » en même temps que « la crainte du Seigneur » qu’un homme de bien » doit « instruire à lire et écrire les enfants des pauvres », une honnête femme doit apprendre aux filles « la couture et les autres choses nécessaires », enfin, il y a un médecin, un chirurgien et un apothicaire des pauvres »5…
Mais bientôt après va s’ouvrir pour nos Pères tout un siècle de persécutions et de proscriptions6. Privés de leurs temples, de leurs droits civils, leurs biens confisqués, ils ne négligèrent cependant pas plus l’exercice de la Charité que celui du Culte, et nombreux sont les documents qui témoignent de l’activité charitable des « diacres » dans les églises du Désert et du Refuge.
Après la signature du Traité d’Utrecht (1713), la Chapelle de l’Ambassade de Hollande est ouverte à nos coreligionnaires, pas pour longtemps ; de 1719 à 1740, des Circulaires Royales leur en interdisent le libre accès. En 1766, ils sont « autorisés » à assister aux services divins du dimanche7, mais la Religion prétendue réformée n’est toujours pas officiellement « reconnue ».
Ce ne devait être que lors de la publication de l’Édit de Tolérance (novembre 1787), que les incapacités dont nos Pères étaient frappés seraient levées. Cet Édit fut développé dans le Décret du 14 décembre 1789, aux termes duquel « les Protestans de Paris furent autorisés à célébrer leurs services religieux rue Dauphine, à l’Ancien Musée, N° 105, les dimanches, à 11 heures du matin ».
Une circulaire d’appel du 12 décembre 17908, nous apprend que le Consistoire Réformé de Paris est alors officiellement rétabli sous la présidence du Pasteur Marron, et qu’une de ses principales préoccupations, celle qu’il fait même passer au premier rang est « le soin des pauvres » :
« La Compagnie, considérant que la nouvelle Assemblée des Protestans de Paris, formée sous les auspices de la renaissante liberté, et qui n’a cessé depuis dix-huit mois de célébrer ses exercices religieux avec décence et tranquillité, semble avoir pris désormais assez de consistance pour que l’on puisse se flatter de la permanence de son succès,
Que toutefois il est important à cet effet de s’occuper à la doter convenablement, afin de pourvoir aux besoins des pauvres et aux frais du Culte.
Que depuis six mois le premier de ces articles est devenu d’autant plus onéreux, que la Chapelle de Hollande a jugé à propos de retrancher la presque totalité de ses assistances et de renvoyer ses pensionnaires au nouvel établissement qui les a adoptés,
Arrête d’adresser une lettre-circulaire spéciale aux fidèles pour les engager à verser une contribution annuelle, volontaire et libre. »
L’année suivante, le Consistoire, en renouvelant son appel signale dans sa circulaire9:
« que, depuis le mois de décembre dernier, la plénitude de liberté religieuse proclamée par la Constitution10 a revêtu la célébration du Culte protestant, maintenant établi dans l’Église ci-devant de Saint-Louis-du-Louvre, de la légalité la plus imposante. »
Enfin, la loi du 18 Germinal An X (8 avril 1802) reconnaît définitivement l’existence légale des cultes protestants, elle fixe leur organisation et son article 20 porte que « les Consistoires veilleront au maintien de la Discipline, à l’administration des biens de l’Église et à celle des deniers provenant des aumônes »11.
L’Arrêté consulaire du 12 frimaire An XI établit à Paris une Église consistoriale et, dans la séance du 20 fructidor de la même année, le Vénérable consistoire de l’Église réformée de Paris élabore un Règlement pour la distribution des aumônes.
La loi de l’an X ne comprenait pas les diacres dans les institutions qu’elle prévoyait, mais ses articles organiques réclamant eux-mêmes le maintien de la Discipline ecclésiastique, le Consistoire en nomma dix12 dès sa séance du 27 pluviôse An XI.
En édictant son Règlement du 20 fructidor de l’An XI13, le Consistoire exposa qu’il entendait régulariser les travaux du Diaconat « conformément à la Discipline des Églises réformées, de manière que la distribution des aumônes soit faite à domicile par les Diacres seulement, que, hors quelques cas qui seront indiqués, les Pasteurs et les Anciens ne soyent pas chargés de la distribution des aumônes ».
Des Instructions qui précèdent ce Règlement comprennent des conseils généraux qui sont restés d’une actualité saisissante :
« Les diacres ne doivent pas toujours céder aux sentiments d’humanité et de bienfaisance qu’ils trouvent dans leurs cœurs, souvent ils sont forcés d’user de sévérité, d’un refus opiniâtre, d’une économie commandée par les circonstances ; ils doivent toujours avoir présent à la pensée qu’ils ne sont que les distributeurs des charités des fidèles, qu’ils ne doivent user ni de prodigalité, ni de parcimonie ; qu’ils doivent s’attacher à connaître tous les pauvres qu’ils secourent, découvrir les vrais besoins, le produit de leur travail, les secours qu’ils peuvent recevoir d’ailleurs… Les diacres doivent surtout s’appliquer à connaître le vrai pauvre, celui qui l’est par des circonstances imprévues, par des événements inattendus, par des circonstances non méritées.
« Celui qui vit dans l’oisiveté…, qui ne rougit pas de mendier ou de mettre à contribution la charité des âmes bienfaisantes pour entretenir ses vices, celui-là ne doit éprouver que des refus. »
Suivant les Instructions de ce Règlement, les diacres devront « aussi chercher à augmenter les ressources de la Caisse des pauvres en s’adressant eux-mêmes aux âmes généreuses, ainsi pourront-ils employer le superflu du riche à couvrir la nudité du pauvre, à obtenir des vêtements pour les uns, du travail pour les autres ».
Il y est encore indiqué que les pauvres seront répartis en 4 classes :
Les diacres restent chargés du « soin des pauvres » domiciliés dans leur arrondissement et ils présentent des demandes de secours en leur faveur au Consistoire, après qu’ils auront recueilli des renseignements sur leur situation. Un diacre ne peut secourir que les pauvres de son arrondissement. Lorsqu’il se présentera de nouveaux pauvres, on les renverra au diacre de leur arrondissement, qui vérifiera leurs besoins, fera régler par le Consistoire la pension à leur accorder et les inscrira alors sur la liste de ses pauvres.
En ce qui concerne les pauvres « mendiants », il est stipulé que les diacres devront être très attentifs à empêcher que les pauvres qui changent de domicile ne reçoivent pas un double secours et que les pauvres qui seront convaincus d’avoir mendié ne recevront « aucun secours ».
Modèle d’ordre plein de sagesse, le Règlement de l’An XI, véritable Charte du Diaconat dans lequel l’Église de Paris sut déjà montrer son fidèle attachement à la tradition de l’Ancienne Église réformée de France, devait nécessairement se trouver modifié suivant le développement même de la Ville de Paris et l’accroissement de l’importance des fonctions diaconales, mais ses principes essentiels furent toujours maintenus.
Dès cette époque éloignée, le Consistoire rédigea chaque année un Appel extraordinaire d’hiver en faveur des pauvres, sous la forme d’une circulaire lue du haut de la chaire et adressée aux Fidèles de l’ensemble de la Consistoriale réformée de Paris.
Le Diaconat de l’Église réformée de Paris fit donc, dans ses premières années, partie intégrante du Consistoire jusqu’en 1813 où, la jurisprudence s’étant modifiée, le droit d’administrer les biens des pauvres fut contesté aux établissements ecclésiastiques.
Pour cette raison, le Consistoire se préoccupa de détacher de lui le Diaconat et celui-ci tint sa première Assemblée distincte, sous la présidence du Pasteur Marron, le 26 janvier 1816. La rédaction de rapports annuels fut décidée et le premier de ses rapports présenté au Consistoire le 19 septembre 181814. Le Rapporteur y signala les détails de l’organisation intérieure du Diaconat et l’utilité de « matriculer » les indigents sur un Registre central.
Une règlementation étroite s’imposa bientôt, en ce qui con cerne la remise des secours, et, dans sa séance du 27 septembre 1820, le Diaconat adopta un nouveau Règlement « tendant à déterminer le mode d’admission ou de rejet des pauvres à la distribution des secours »15.
Deux ans après, le 2 octobre 1822, le Diaconat règlemente une « Association des Dames de la Charité », dont les fonctions consistent principalement à « recevoir et à faire parvenir au Diaconat les demandes des pauvres et des malades, à prendre et à donner des renseignements sur ceux qui réclament des secours, à procurer du travail, à visiter les indigents et à proposer tous les moyens convenables pour améliorer leur sort en se concertant à cet égard, autant que cela sera possible, avec les diacres chargés de l’Administration des pauvres qu’ils visiteront ».
La préoccupation de procurer du travail aux indigents amène la création d’une Commission de Placement dans le sein même du Diaconat. Cette Commission élabore, la même année, un Règlement portant (art. 3) que, « si un indigent, par des motifs non valables, refuse le travail que la Commission lui aura proposé, elle en fera un Rapport au Diaconat et demandera qu’il soit rayé de la liste des assistés. »
En 1823, l’Administration du Diaconat Réformé de Paris est déjà devenue assez importante pour que soit nécessaire la nomination d’un Agent appointé.
Les visites des indigents à domicile par les diacres étant de plus en plus nombreuses, ceux-ci leur remettent des bulletins de visite. Les indigents ne reçoivent de secours que contre dépôt de ces bulletins (1824), et une Commission de Recensement est instituée en mai 1824 pour centraliser tous les renseignements, les mettre en ordre, établir un contrôle.
De légères modifications sont introduites en 1825 et en 1839, au Règlement de 1820.
En 1848, les distributions allant toujours en augmentant, le Diaconat fait une refonte générale de tous ses règlements antérieurs et en rédige un nouveau.
Cinq années plus tard, le Décret-Loi du 26 mars 1852 vint modifier l’organisation officielle des Églises réformées par l’institution de « Conseils presbytéraux » chargés d’administrer les Paroisses sous l’autorité des Consistoires (art. I). Les attributions des deux Corps furent fixées par un Arrêté ministériel du 20 mars 1853, portant à son article premier que le Conseil presbytéral maintient l’ordre et la discipline dans la Paroisse… et administre les deniers provenant des aumônes ».
Cette nouvelle législation amena le Diaconat réformé de Paris à reprendre le Règlement de 1848, en vue de l’adapter aux prescriptions nouvelles. Il le fit le 17 juin 1852, en s’efforçant de ne rien changer dans l’esprit même du Règlement, et de ne rien modifier à son organisation intérieure. Le seul changement introduit fut que « le Conseil presbytéral élirait les diacres et nommerait le Trésorier et l’Agent du Diaconat ».
Les liens du Diaconat avec le nouveau Conseil Presbytéral unique de l’Église réformée de Paris restèrent donc, de façon très heureuse, des plus étroits et, lorsqu’à la suite de longues démarches faites par le Consistoire en vue d’obtenir un immeuble destiné « à l’Administration générale du culte réformé à Paris », M. le Sénateur Préfet de la Seine remit — au nom de la Ville de Paris — à M. le pasteur Juillerat-Chasseur, en sa double qualité de président du Consistoire et du Conseil Presbytéral de l’Église réformée de Paris, l’immeuble de la Maison consistoriale où nous nous trouvons encore réunis ce soir (immeuble dénommé Maison presbytérale depuis la séparation des Églises et de l’État), le Diaconat Central s’y voit lui être officiellement reconnu « droit d’asile et d’occupation ».
Au premier étage, sur la cour, une salle de réunions pour le Diaconat [salle actuellement dénommée « salle Louis-Vernes »], énonce le Procès-verbal de Remise de cet Immeuble communal, en date du 21 novembre 185717.
L’agrandissement de Paris et la création des nouveaux lieux de culte de Batignolles, de Belleville, de Plaisance et de Vincennes, ainsi que le nombre toujours croissant de misères à soulager, devait amener, en 1860, une nouvelle transformation par l’institution de Comités paroissiaux.
Cette importante décision ne rompit en aucune façon l’unité du Diaconat, le Conseil presbytéral ayant eu soin d’inscrire à l’article premier d’un Règlement additionnel adopté en novembre 186018, que « le Diaconat conserve son ancienne organisation et que les Règlements généraux qui ont présidé jusqu’ici à ses opérations, continueront à fonctionner dans leur entier ».
Le changement consiste seulement en ce qu’une Commission, dite d’enquête, est formée dans chaque paroisse et se compose autant que possible, des « diacres » résidant sur sa circonscription. Ces Commissions se rassemblent sous la présidence du pasteur. Elles peuvent distribuer des secours d’urgence, mais les demandes de secours mensuels et réguliers continuent à être soumises sur rapports au Comité central. Les secours une fois accordés sont distribués par l’entremise des Commissions d’enquêtes, autant que possible, à domicile.
Enfin, le Diaconat central fait chaque trimestre une répartition des fonds entre les diverses paroisses, dans la proportion de leurs nécessités prévues et constatées, pour être appliqués aux secours d’urgence.
Une telle décentralisation des services mit chaque diacre dans l’obligation d’apporter un soin toujours plus scrupuleux à l’examen des demandes ; on édicta des mesures spéciales de distribution de secours d’hiver, de remise de vêtements à l’Économat de la Maison presbytérale, de secours de chauffage.
Un nouveau Règlement est adopté par le Conseil presbytéral le 9 mars 1867. La composition du Diaconat central désormais dénommé « Diaconat général c reste presqu’identique à celle établie par le Règlement de 1853.
Dans le courant de cette même année (1867) le Conseil presbytéral de l’Église réformée de Paris, sur la demande du Diaconat, décide la suppression de l’Économat de la Maison Consistoriale, ce magasin coûtant fort cher et l’inconvénient d’un seul magasin central pour les indigents des paroisses éloignées s’étant fait sentir à plusieurs reprises.
On se rend compte au Diaconat, que les mesures de décentralisation adoptées tendront à fortifier l’autorité et la responsabilité de chaque Comité paroissial pour les œuvres de sa circonscription, mais on ne craint pas qu’elles portent jamais atteinte à l’esprit de corps qui se manifeste dans les réunions de la Commission centrale du Diaconat général, qui ont déjà lieu régulièrement le dernier vendredi de chaque mois, sous la présidence, à tour de rôle, de Messieurs les pasteurs de l’Église réformée de Paris.
Les épreuves de la Guerre franco-allemande, du Siège et de la Commune, trouvèrent le Diaconat fidèle à son poste, mais l’augmentation toujours croissante des secours mensuels, due en grande partie aux souffrances créées par la Guerre, l’amena, dès 1871, à étudier de nombreuses modifications.
Une Commission mixte, composée d’Anciens et de Diacres, fut instituée par le Conseil presbytéral et chargée d’examiner la situation. Elle élabora un projet de réorganisation du Diaconat général ayant pour effet de « confier à chaque Comité paroissial le droit d’administration de ses secours, et d’attribuer à chacun d’eux une allocation totale en rapport avec les ressources disponibles, calculée de façon à satisfaire à l’ensemble des charges qui leur étaient imposées ».
C’est l’origine des allocations actuellement dénommées « Allocations d’insuffisances ».
Le Diaconat Général ne devait plus dès lors retenir que la direction générale avec la surveillance des Comités, l’attribution de secours à des orphelins et vieillards sur la présentation des Comités, et les rapports avec les Établissements dans lesquels ceux-ci étaient placés.
Ce projet, présenté sous la forme d’un amendement au Règlement de 1867, fut adopté par le Diaconat le 29 décembre 1871, et approuvé par le Conseil presbytéral le 19 janvier 1872. Il fut complété par un nouveau Règlement adopté en 1877.
Cinq ans après, en 1882, le Diaconat général allait avoir à traverser une nouvelle crise plus redoutable encore pour lui que celle de 1852. Monsieur le Vice-Président vous dira dans un instant comment il en triompha.
Le nombre des diacres qui composèrent le Diaconat général pendant la période de 80 années que nous venons d’évoquer devant vous passa successivement de 10 en 1803 à 40 en 1832, 90 en 1866 et 125 en 1882.
Ses réunions eurent lieu de 1802 à 1857, dans la Grande sacristie du temple de l’Oratoire — où se tenaient aussi les Assemblées du Consistoire et du Conseil presbytéral de l’Église réformée de Paris — et de 1857 à 1882, comme depuis 1882, dans la salle affectée de l’immeuble remis au Consistoire et au Conseil Presbytéral de Paris, en 1857.
Son rôle n’a pas varié dans la suite des années. Il peut se résumer ainsi dans ses grandes lignes :
Assurer, par le soin des Diaconats particuliers, la visite des pauvres réformés à domicile, et la distribution des secours sous les formes les plus diverses ; placer et entretenir des enfants, des vieillards, des infirmes et des malades dans des établissements appropriés ; aider les institutions de Bienfaisance qui reçoivent les protégés des diaconats.
Mais sa mission est plus haute encore. Elle dépasse, de nos jours comme dans le passé, cette œuvre cependant déjà « bienfaisante » d’assistance.
Fidèle à la tradition de l’Église chrétienne primitive, le Diaconat n’a en effet pas cessé, tout en suivant l’évolution des temps modernes, et ne cesse pas d’avoir pour but encore de nos jours, non seulement le soulagement passager ou momentané de la misère, mais le « soin des pauvres » et l’affranchissement du prochain de tout ce qui risque de l’empêcher d’être pleinement « un homme ».
Ceci une fois réalisé, le Diaconat apparaît comme la véritable institution de Service social que le Christ lui-même et ses apôtres ont voulu fonder. Elle est « Œuvre de Foi et d’Espérance » en même temps qu’elle est « Œuvre de Charité et d’Amour ».
Dans un récent travail remis à la fin de ses études de « Service Social », une des élèves de la Fondation Paul-Doumergue19, ayant à donner une définition de ce Service, en trouva une nouvelle, fort juste à notre avis. Elle écrivit qu’elle voyait dans le Service Social « une manifestation de la Charité ayant pour but, en définitive, « le salut de la personne humaine et le bien de la Société ».
Le salut de la personne humaine. Tel est bien exactement le but que vous poursuivez, diacres d’aujourd’hui, dignes héritiers des diacres d’autrefois, Membres du Diaconat « Sénat de l’Église », qui cherchez non seulement à secourir le pauvre ou le malheureux, mais qui vous attachez, en outre, à comprendre sa souffrance, qui savez y « compatir » et qui, assurés vous-mêmes qu’il ne « servirait à rien à un homme de gagner tout le Monde s’il perdait son âme » (Matth. XVI. 26), vous préoccupez, en accord avec Messieurs les honorables pasteurs de nos Églises, « de l’état de l’âme » des pauvres que vous visitez.
Ainsi émerge, en pleine lumière, avec toute sa grandeur et toute sa noblesse, le « Service du prochain » que le Diaconat accomplit et assure depuis maintenant plus d’un siècle dans la Ville de Paris, « pour l’Honneur et à la Gloire de Dieu ».