809 (2017 T1) – L’identité protestante

Éditorial

 

  • La Loi, les prophètes et l’entrée dans le royaume de Dieu, par Marc Pernot

 

Dossier : L’identité protestante

 

  • Bonne et dangereuse identité, par Marc Pernot
  • Une identité plurielle, inachevée, encore en espérance, par Olivier Abel
  • L’identité protestante vue par les paroissiens, par Stéphane
  • A travers les professions de foi, par André Ducros et Rose-Marie
  • De l’appartenance, par Anne-Catherine

 

Calendrier des cultes

 

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L’identité protestante

 

Bonne et dangereuse identité,
par Marc Pernot

 

Aujourd’hui, dans la préparation d’une cérémonie de mariage, nous sommes leplus souvent dans le cadre de familles présentant de multiplesappartenances religieuses, idéologiques, philosophiques, sociales,culturelles, géographiques. C’est le reflet d’une plus grande liberté dansle choix du conjoint, mais aussi dans le choix de sa propre identité.

 

Un des grands avantages de cette évolution est une grande sincérité dansnos attachements. Mais ce peut aussi être source de difficultés car c’estexigeant de devoir bâtir sa propre identité, de la faire vivre et évoluer.Cette diversité est source de richesse, elle pourrait aussi nous conduire àmettre nos identités à leur juste place, ni trop haut ni trop bas dans nosattachements. Mais cette diversité peut aussi être source de conflits aveccette multiplication exponentielle des rencontres avec des personnes quinous sont très différentes.

 

Pour ce dossier, nous vous proposons quelques éléments de réflexion etquelques témoignages sur notre rapport à l’identité protestante. Bienentendu, comme toujours dans notre église, chaque parole est à prendrecomme une proposition de questionnement personnel, et non comme un devoirimposé à notre conscience. Peut-être que c’est même là un trait majeur del’identité de notre église. Il ne se voit pas de l’extérieur mais se vit.De l’extérieur, le passant voit cette belle chapelle royalemulti-centenaire et un culte délibérément « vintage » avec des chants etdes textes qui viennent des générations passées. Alors que dans le sens dece qui est proposé, l’accent est mis, délibérément aussi, surl’émancipation de chaque personne dans sa pensée et dans sa relation àDieu. Cela se manifeste dans le sens des messages (j’espère), dans laliberté accordée à chacun, dans le respect et dans l’accueil des personnesdiverses. Pourquoi cet apparent paradoxe entre une forme ancienne et unfond progressiste ? En espérant que la forme rassure notre identité et lafasse se sentir libre d’évoluer. Au bénéfice de tous.

 

Marc Pernot

 

 

Une identité plurielle, inachevée, encore en espérance,
par Olivier Abel

 

A chaque rencontre nous sommes placés devant des nouveau-venus, qu’ilssoient nos propres enfants ou des étrangers, qui surviennent un par un danscet espace d’apparition mutuelle qu’est le monde, la société humaine, etpar excellence l’Eglise, espace ouvert par la question de confiance queJésus nous a posée : « Et vous, qui dites-vous que je suis ? ». Je voudraisrapidement esquisser trois formes de réponse à cette question, ou à cetappel.

 

On peut d’abord parler de l’identité comme acceptation modeste d’être ceque l’on est : on est né, on a un corps, une langue maternelle, un pays,des attachements. L’identité prend ici la forme de la fidélité.Comme l’écrivait jadis Paul Ricœur, pour accueillir ou « pour rencontrer unautre que soi il faut avoir un soi ». Attention, il est facile, pour tousceux qui sont assurés de leurs racines ou bien assis sur leur patrimoineculturel, de traiter cette question avec nonchalance. Mais pour tous ceuxqui se retrouvent déracinés par la tempête, déplacés loin de chez eux, oudépaysés chez eux parce que ne reconnaissant plus rien, la question n’estpas un luxe, c’est une question vitale d’immunité. Il y eut des époques oùle protestantisme n’a survécu que grâce à cette ténacité dans laprotestation, dans le résister. Mais cela ne suffit pas.

 

Il faut ensuite parler d’une identité interrogative. C’estpeut-être ici le cœur battant du protestantisme comme gratitude d’exister.La question « Qui suis-je ? » est convertie, retournée, par une sorted’insouciance de soi-même qui est la grâce, et où l’existence n’est qu’unrendre grâce, dans un art de l’éphémère qui est notre style. Il m’estarrivé de définir le protestantisme comme une tradition autonettoyante. Onpeut aller jusqu’à parler d’un principe d’identité absente. Laquestion de l’identité est ainsi la case vide qui permet de tout mettre enmouvement, de tout déplacer. Mon identité est tournée vers autrui, devantautrui : nous sommes tout à tous. Si on me demande : « En quoi c’estspécifiquement protestant? », je réponds : « C’est à d’autres de me ledire. Ce n’est pas à moi de me retourner tout le temps pour voir si monombre me suit ! ».

 

La troisième forme serait enfin celle d’une identité narrative,métaphorique, poétique, prophétique, sapientiale, épistolaire, bref feuilletée. C’est d’abord notre identité de peuple lecteur.Lorsque j’étais enfant je regardais la Bible de mon père et je voyais quelslivres il lisait le plus : c’était noirci, les Evangiles étaient très lus,les Psaumes aussi, qui sont le cœur de la lecture protestante. Chacuntrouve son identité protestante de lecteur, comme un code-barres, sur latranche de sa bible usuelle. C’est plus largement que nos identitésproviennent de mille sources, de mille enfances, et nous sommes parmi d’autres. Il s’agit pour chacun de nous de déployer nospluri-appartenances, d’intérioriser les tensions qui font notre identité.Il s’agit de découvrir combien notre identité est plurielle, inachevée, etencore en espérance.

 

Professeur Olivier Abel

 

 

L’identité protestante vue par les paroissiens,
par Stéphane

 

« Y a-t-il une identité protestante ? » vous demandait-on en proposant aumois d’octobre un questionnaire à tous les participants aux cultes del’Oratoire. Pour ce faire, nous avions regroupé un certain nombre denotions autour de quatre chapitres : conscience religieuse, éthique,communauté / fraternité et héritage et tradition(s). Et invitions chacun àclasser ces thèmes ou à les commenter. Plutôt qu’une analyse tropfastidieuse des trente réponses reçues, nous avons préféré résumersuccinctement les tendances qui apparaissent et laisser la place à delarges extraits des commentaires ajoutés aux questionnaires afin derestituer la richesse des contributions des participants, que nousremercions ici bien vivement.

 

Rapport à Dieu et conception de la foi

 

A l’intérieur du premier chapitre « La conscience religieuse », les notionsde « rapport à Dieu » et de « conception de la foi » sont mises en avant,bien davantage qu’une « liturgie spécifique ». Et puisqu’il s’agit là deressentis très personnels, reproduisons ici tels quels quelques-uns descommentaires :

 

  • « Une foi qui n’est pas croyance, mais confiance. Un rapport à Dieu modifié par la représentation qu’on en a. Dieu pensé comme force de vie, comme tension vers une plénitude d’exister… qui tend à être… »
  • « J’aime prier librement sans contraintes. L’accès à Dieu est plus proche, dommage qu’il y ait plusieurs protestantismes. »

 

« Être protestant c’est à mes yeux avoir le réconfort de regarder Dieucomme un enfant regarde ses parents. C’est se sentir le droit de construirelibrement son parcours de vie spirituelle quand d’autres ne ressentent quele droit d’emprunter un parcours tout tracé par ceux qui les ont précédésou les entourent. C’est vivre avec Dieu et non face à Dieu. C’est êtreredressé, et non courbé par le poids des traditions, des lois, des modes.C’est témoigner que l’on a foi en l’Homme quoiqu’il arrive parce que Dieului-même, malgré tout, a foi en l’Homme. »

 

  • « Je suis venu vers vous parce que la liberté de croire, de douter, de ne pas croire, d’avancer à son rythme est mise en avant. »
  • « Ce qui caractérise l’identité protestante, c’est la liberté avec laquelle la parole de Dieu est annoncée, la simplicité du culte et de la doctrine, la pluralité des actes et des croyances qui permet l’accueil de personnes de différents horizons. »
  • « Mon identité chrétienne est la mieux représentée aujourd’hui au travers de l’être protestant, la pensée protestante, mais elle n’est pas la seule. »
  • « Si je résume en deux mots le sens communiqué par le protestantisme, ce sera fidélité et responsabilité, conviction intime et ouverture aux autres. »

 

« Le propre du protestantisme est, me semble-t-il, de considérer l’Église
comme une institution sociale et non comme une hiérarchie dépositaire dudivin.
D’où une spiritualité en contact simple avec Dieu. »

 

Éthique et responsabilité

 

Au chapitre « L’éthique », la « responsabilité individuelle » est classéeen tête du palmarès des valeurs proposées. « Une responsabilité de soi-même», écrit un répondant, qui poursuit : « Dans la responsabilité de soi, il ya la responsabilité d’autrui. Je suis d’autant plus humain en dépassant lesouci de moi-même par l’attention à autrui ». Ce rapport à autrui nourrittoujours la réflexion sur la responsabilité, comme cette autre répondantequi pense également aux limites de la responsabilité individuelle : « Parceque nous avons ce sentiment filial envers Dieu qui nous aimeindéfectiblement, je ne vis pas sans cesse dans la crainte, le repli sursoi, le calcul. D’où l’esprit d’entrepreneuriat et l’attention portée auxinitiatives personnelles et collectives, l’utilisation décomplexée del’argent. Pour le meilleur et pour le pire… Car le protestantisme a sapart dans l’industrialisation à grande échelle et le capitalisme libéralqui asservissent bien des populations et polluent la planète. Il a sa partaussi je crois dans les égarements de la recherche médicale, deslaboratoires. »

 

Et nous voilà confrontés à « la façon de se tenir dans le monde », uneformulation qui suscite de nombreuses adhésions. On se souvient que cettebelle formule était déjà utilisée par le professeur Didier Sicard dans Protestants de France, le documentaire de Valérie Manns diffusésur France 5 au printemps dernier.

 

Enfin, un troisième critère est si souvent cité qu’il en apparaît commeconstitutif d’une éthique protestante : « la place des femmes dans l’Égliseprotestante ». En témoigne cette remarque ajoutée à un questionnaire : « Ettoute la dimension historique en tant que minorité persécutée qui resserreles liens entre les protestants de tradition et qui renvoie aupositionnement des femmes depuis des siècles, à des fonctions deresponsabilité : enseignement aux enfants pendant les guerres de religion,puis … puis pendant la guerre de 14 (rôle économique, social, religieux,certaines ont remplacé leur mari pasteur parti au front, etc …) ».

 

« C’est la façon de se tenir dans le monde en portant un message enperpétuelle évolution. »

 

Communauté et engagement social

 

Ici, c’est l’appartenance à la « communauté humaine » (« l’humanité toutentière ! ») qui est plébiscitée par les paroissiens, mais toujoursassociée à l’engagement au sein de cette communauté. Un commentaireillustre ce lien : « Je me sens appelée à jouer un rôle actif dans lasphère sociale. Lutte contre la pauvreté, la solitude, la pollution, lamaltraitance animale et environnementale. Je me sens capable d’être activeet non passive, grâce à la force de Dieu, qui sait multiplier l’impact desplus petites actions. »

 

« L’appartenance à une minorité », en revanche, ne semble pas essentielleaux répondants, même si l’un d’entre eux note : « Une minorité (…) que jerevendique sans modestie comme une « élite ». Prétention à l’élite sur deuxcritères : l’usage de la raison du savoir et dans le cas particulier de laFrance, une volonté, une force d’affirmer sa liberté. »

 

Et comme l’appartenance à une communauté est aussi avant tout celle de laparoisse, un commentaire sonne comme une invitation à tous : « Al’Oratoire, on reconnaît les gens (paroissiens) mais on ne les connaît pasou mal. »

 

« Le fait d’appartenir à une communauté portant un engagement social fort.»

 

Hériter et transmettre

 

Si la question de l’héritage ne taraude pas tout le monde (« Pas concerné,venant du catholicisme »), elle est cependant au cœur de bien desréflexions : « Je ne me suis jamais posé la question depuis quand je suisprotestant, mais le protestantisme coule dans mes veines. » Ou encore cetémoignage : « Si j’ai eu le privilège de recevoir par filiation cette »identité protestante », ce que j’apprécie avant tout, c’est cette libertéde conscience. Pour moi, Dieu est inhérent à ma conscience. Dieu n’est pasà l’extérieur, il est à l’intérieur de moi, au plus profond de mon être.Tout au long de ma vie, j’ai façonné mon identité protestante grâce à toutce que l’Eglise m’apporte : les sermons, les études bibliques, les lecturesd’Evangile et liberté, etc., et cette ouverture aux autres et aussi à ceuxqui ne pensent pas comme moi. C’est toujours une grande richesse departager. »

 

Et voici posée la question du partage et de la transmission. « Oui, il y aune identité protestante, par hérédité des caractères et par l’éducation.Mais se poursuit-elle ? », demande un répondant. A quoi une contributionapporte comme une jolie réponse: « On apprend aux tout-petits à lire et àécrire dès le plus jeune âge. Pour moi le protestantisme est commel’alphabétisation, indispensable à l’épanouissement personnel, à laconfiance en soi, à l’apprentissage du rapport à l’autre, à une « lecture »éthique du monde. Mon identité protestante me pousse à cultiver ettransmettre la culture protestante au sein de ma famille, y compris auxplus jeunes. »

 

Le foisonnement et la richesse des réponses reçues sont forcément bienimparfaitement restitués ici, mais prouvent aussi, espérons-le, que cequestionnaire méritait d’être proposé. Il n’est après tout quel’illustration de ce que disait Paul Ricœur en évoquant le fait d’êtreprotestant par « un hasard transformé en destin par un choix continu ». Unchoix et des questionnements remarquablement exprimés par les paroissiens.

 

« Un héritage compris non comme un savoir, un capital,
mais comme une démarche, une volonté, un choix libre. »

 



Le chandelier des Réformateurs, Pays-Bas, XVIIe siècle

 

 

A travers les professions de foi,
par André Ducros et Rose-Mariee Boulanger

 

En cette fin d’année, dans le cadre de ce numéro consacré à l’identitéprotestante, il nous est apparu intéressant de faire une analyse sur ladémarche d’adultes demandant le baptême ou à faire une profession de Foidevant l’assemblée.

 

Nous avons relu quelques professions de foi faites au cours de cette annéepar des personnes qui ont préparé d’abord dans le secret et le silence dela méditation et de la prière, puis en lien avec un pasteur, cette démarchetrès personnelle. Nous avons tenté de décrire leurs motivations, leursrecherches, leurs désirs. Pourquoi avoir choisi l’Oratoire ? Pourquoiont-ils fait le choix de devenir protestants ?

 

Ces baptêmes ou professions de foi exprimées devant l’assemblée, sontdevenus réguliers le dimanche. Elles sont, la plupart du temps, suiviesd’un résumé du cheminement spirituel et personnel du nouveau paroissien.Ainsi nous découvrons avec une certaine émotion des parcours de vie parfoischaotiques ou surprenants.

 

Démarches personnelles

 

Le trait commun à ces démarches très personnelles semble être vécu comme unaboutissement et comme une libération, voire une résurrection à soi-même etau monde. Mais ce n’est qu’une étape. Tous cherchent Dieu. Tous disent queleur vie a été transformée par ce parcours. Ils étaient athées,agnostiques, ou souvent catholiques, cependant ils étaient en recherched’une autre expression de leur spiritualité.

 

Ces démarches nous démontrent combien les hommes ont besoin de recherchesspirituelles afin de donner un sens à leur vie et aux choses de la vie, etde croire en Dieu. Cela constitue un chemin dur, semé de doutes etd’interrogations. Ainsi nous pouvons lire dans une profession : «Epargne-moi le doute ». Pourquoi chercher à éviter le doute ? Pour nous, ilest inséparable de la foi et fait partie du cheminement de chaque chrétien.Ne pas douter, c’est sans doute avoir « la foi du charbonnier » ce qui pournous protestants, ne correspond pas à notre approche de la Bible, ni àl’interprétation des textes bibliques que nous en faisons, comme cela a étéplus brillamment développé il y a peu dans une revue théologique amie.

 

Protestantisme et liberté

 

Ce qui nous a frappé c’est que dans ces professions de foi, le mot deliberté revient régulièrement. Etre protestant, c’est reconnaitre uneliberté de penser, de lire librement la Bible et d’essayer de chercher, parnous-mêmes, le sens des textes par notre réflexion personnelle, tout enprenant la distance nécessaire pour éviter le littéralisme. Libre aussi dedouter, libre de ne pas être d’accord avec tout ce qui est prêché undimanche par le pasteur, libre d’interpeller Dieu comme on le veut ou commeon le peut. Protestantisme et liberté sont indissociables. Cela nous aide àdépoussiérer ainsi les textes et les interprétations qui ont pu en êtredonnées pendant des générations en les considérant par rapport à notreépoque, et à nos problèmes.

 

Il est vrai que répéter sans cesse les mêmes phrases et interprétations destextes peut avoir quelque chose de rassurant et de confortable. Au fond «l’homme protestant » est un homme qui est en permanence en recherche etc’est cela, aujourd’hui, qui attire ces personnes. Comme nous, elles sonten questionnement sur le sens des choses de la vie et peuvent s’appuyer surl’expérience des femmes et des hommes de la Bible, pour essayer d’avanceret de progresser en bénéficiant de ce qu’ils ont éprouvé avant nous, enbénéficiant de leurs intuitions fondamentales qu’ils ont vécues avant nous.

 

Comment sont-ils arrivés à l’Oratoire ? La recherche se fait la plupart dutemps avec les outils du siècle, c’est-à-dire sur internet. Au « hasard »(mais existe-t-il ?) de leurs recherches, ils arrivent très vite sur lesite de l’Oratoire, l’un des plus consultés sur le protestantisme. Aprèsune consultation un peu approfondie, une présence discrète à plusieurscultes, la démarche peut se transformer en un désir de mieux connaître leprotestantisme et sur ce qu’il dit et porte aujourd’hui dans le monde. Lesrencontres avec le pasteur en dernier lieu, grand merci à lui, complètentle désir d’approfondir la réflexion personnelle. La foi naissante commencealors son long travail, souterrain et silencieux, et se construit peu àpeu.

 

Ils veulent trouver autre chose que ce qu’ils trouvent soit dans une vielaïque sans valeur spirituelle suffisante, soit parce que leur ancienneéglise, catholique bien souvent, ne leur offre plus la nourriturespirituelle et la liberté de réflexion qui leur permet de vivre en bonnecorrespondance et adéquation avec le monde d’aujourd’hui.

 

Par la participation à des réunions d’initiation puis d’approfondissement àla théologie protestante, (oui cela leur demande un réel effort), ilscomplètent leur connaissance du protestantisme. L’éveil oul’approfondissement spirituel dissipe peu à peu le brouillard de leur vieet une autre image de Dieu et du chemin de vie que chacun de nous trace,apparaît et leur permet ainsi d’avancer à nouveau malgré les obstaclesinévitables de la vie.

 

C’est une joie pour nous que toutes ces personnes choisissent notre Egliseprotestante et en particulier notre communauté de l’Oratoire pour dire leurprofession de foi et, nous l’espérons y demeurent, pour faire grandir leurfoi avec nous, par un travail de réflexion personnel et collectif, basé surl’échange, le partage, le doute, l’action collective et fraternelle.

 

Cela leur demande un effort très louable et nous leur en sommesreconnaissants, car nous vivons dans une société française marquée depuisdes années par une laïcité très militante qui a tendance à cantonner lereligieux au strict domaine privé.

 

Accueillir et entourer

 



Il nous appartient donc, à nous Conseil presbytéral et membre de lacommunauté fraternelle de l’Oratoire, de les accueillir au mieux etd’entourer ces personnes, qui nous font confiance et viennent dire undimanche, qui n’est pas comme les autres pour eux et nous, devant toutel’assemblée, leur foi en Dieu, et Jésus le Christ en notre confessionprotestante.

 

L’Eglise ou Communauté est là comme une grande famille pour aider etsoutenir celles et ceux qui en ont besoin, et qui veulent partager lalecture de la Bible, la prière et l’accueil fraternel. C’est ainsi quechacun de nous peut progresser individuellement grâce aux autres. Dans lefond, c’est le sens premier et essentiel de l’Eglise, et nous nousréjouissons que ces nouveaux baptisés aient choisi l’Oratoire, pourcontribuer à la construction de l’Eglise universelle. Il semble que notrecommunauté, en particulier à l’Oratoire, soit reconnue pour afficher ungrand respect de la liberté de penser de chacun, et de témoigner de sa foitout en gardant une réelle ouverture vers le monde et l’extérieur. En fait,c’est toute la question de nos églises de trouver le bon équilibre entreaccueil et partage de l’Esprit communautaire pour faire progresser notrefoi et notre ouverture vers le monde.

 

Quand l’Eglise sait faire vivre sa dimension communautaire, elle devient unlieu prophétique et d’espérance et d’amour. Espérons-le pour notre paroissede l’Oratoire.

 

André Ducros et Rose-Marie Boulanger

 

 

De l’appartenance,
par Anne-Catherine

 

Qu’est ce que l’identité? Un des sens donné par le dictionnaire Robert mesemble adapté à notre sujet : « Caractère de ce qui est un, de ce quisemble identique à soi-même ».

 



En effet, nous changeons sans cesse tout au long de notre vie, et pourtant,pour avoir le sens d’«exister» pleinement, nous devons garder le sentimentque nous restons «un». Notre sentiment d’exister est entretenu par deuxtypes de relations, affirme le psychanalyste et thérapeute familial RobertNeuburger, les relations interpersonnelles et les relations d’appartenance.Les relations interpersonnelles, (rapport privilégié entre deux êtres,positif ou négatif!) permettent les identifications.

 

Mais ces relations interpersonnelles doivent être contenues dans descercles d’appartenance: ce sont nos relations avec les groupesd’appartenance importants pour nous qui nous confèrent notre identité. Lepartage avec d’autres de valeurs, croyances, buts,… crée une communauté,marquée par une solidarité, une loyauté entre les membres du groupe. Cesgroupes peuvent être notre couple, notre famille actuelle, notre familled’origine, mais aussi nos cercles d’amis, notre groupe sportif, le groupereligieux auquel nous nous sentons appartenir. Nous entretenons cesappartenances, en en respectant les rites (la participation au culte, leport de la croix huguenote, le paiement de la cotisation…) et en gardant entête les mythes, croyances dans les points communs au groupe (de deuxsortes dans le cas de notre appartenance protestante : notre Credo, d’unepart :«Je crois en Dieu, en Jésus-Christ», et toutes les qualités réellesou supposées communes aux «protestants » : sérieux, austères…). Il est vraique le protestantisme porte beaucoup plus d’attention aux croyances qu’auxrites ! Les rites soutiennent la force des mythes : la participation à laSainte-Cène vient incarner le mythe de partage propre à tout grouped’appartenance de type fraternel.

 

Contrairement à l’idéal fictif d’un individu «autonome», notre liberté nedécoule pas de notre absence d’engagement dans des groupes, mais aucontraire de la multiplicité de nos engagements dans des groupes d’essencesdifférentes. Notre appartenance protestante vient donc enrichir etrenforcer notre identité. Contrairement à une appartenance sectaire, nousgardons notre liberté d’appartenir au protestantisme (en en respectantrites et mythes), d’en quitter le groupe, les relations interpersonnellesentre les membres du groupe des protestants restent totalement libres(aucun gourou ne les interdit, impose ou contrôle, nous ne sommes nullementobligés d’aimer chaque protestant !).

 

Pour ma part, je suis imprégnée par les textes bibliques («Tout protestantest pape, une Bible à la main»). Je me souviens que le protestantisme a étéun des premiers modèles de démocratie en Europe, que sa pratique aencouragé l’alphabétisation des hommes et des femmes dès le XVI° siècle,qu’il a mis les femmes sur un pied d’égalité avec les hommes. Ce mélange derespect, de fidélité, mêlés à la recherche et la critique («Protester»,«Résister») me paraît très fort.

 

 

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